: FO CASVP: AGENT CONVOQUÉ DANS LE CADRE D’UNE PROCÉDURE PÉNALE

jeudi 4 juillet 2013

AGENT CONVOQUÉ DANS LE CADRE D’UNE PROCÉDURE PÉNALE

Fiche Technique FO CASVP n° 177

Que ce soit en matière de ressources humaines (harcèlement moral, discrimination…), de marchés publics (favoritisme…), de vol, de maltraitance ; un usager ou un proche ou encore l’administration elle-même peut déposer plainte.


De fait, le risque pénal est de plus en plus a intégré dans le parcours professionnel de chacun.

Très souvent négligées en termes de préparation, les premières auditions sont pourtant déterminantes pour la suite du dossier.


Se situer dans la procédure pénale
L’audition peut prendre plusieurs formes et obéir à différentes règles et garanties selon le cadre procédural dans lequel on se situe.

1. Enquête préliminaire ou de flagrance
Il peut s’agir d’une audition par les enquêteurs au cours d’une enquête préliminaire ou de flagrance. Cela signifie que seul le procureur de la République est saisi et qu’il agit donc seul avec l’aide de ses enquêteurs, sans intervention d’un juge d’instruction.

Cette situation donne parfois des éléments de fait ou de droit directement au procureur, de nature à l’éclairer sur un dossier avant qu’il ne prenne d’importantes proportions, et permet au magistrat de prendre une orientation adaptée à la situation (qui peut être un classement sans suite, une maison de justice, une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, ou l’ouverture d’une information judiciaire par la saisine d’un juge d’instruction).



2. La commission rogatoire
S’il s’agit d’une commission rogatoire, cela signifie qu’un juge d’instruction a été saisi, et que c’est désormais lui qui est chargé d’enquêter (on dira « d’instruire » pour un juge d’instruction), et il le fait en délivrant des commissions rogatoires à des enquêteurs (une sorte de délégation du pouvoir d’enquêter). Cela signifie alors que le délai de traitement sera souvent beaucoup plus long qu’une enquête préliminaire ou de flagrance, que des mises en cause interviendront de manière quasiment sûre (sous le statut de témoin assisté ou de mis en examen), et qu’il peut être très inopportun à ce stade de donner certains éléments sans connaître le contenu du dossier auquel on pourra accéder une fois la convocation reçue chez le juge d’instruction.



Des auditions sous plusieurs statuts

 
1. Le simple témoin
En enquête préliminaire ou de flagrance, vous pouvez alors être entendu(e) comme simple témoin. Vous êtes dans ce cas toujours entendu sans avocat, qui n’a donc jamais accès au dossier. Mais il peut aussi exister à votre encontre « une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner que [vous avez…] commis ou tenté de commettre une infraction ». Dans ce cadre vous pourrez, pour les nécessités de l’enquête (selon la formule consacrée), être placé€ en garde à vue pour y être entendu(e) et retenu(e) sous ce régime et en bénéficiant des garanties propres à celui-ci.

Si un juge d’instruction a été désigné, vous pouvez être convoqué(e) pour comparaitre devant lui comme simple témoin, soit comme témoin assisté, soit comme mise en examen. Selon le cas, vous bénéficiez de garanties procédurales plus ou moins étendues, directement proportionnelles à l’existence et à la gravité des indices rendant possible votre participation, comme auteur ou complice, à un délit (favoritisme, faux, usage, prise illégale d’intérêts…) ou un crime (faux en écriture publique…)



5 règles essentielles

  •  Rester vigilant en permanence et ne jamais baisser l’attention
  •  Être très attentif à la retranscription sur procès-verbal
  • Ne jamais aller au-delà de la question posée
  •  Rester strictement dans ses attributions
  •  Relire attentivement son PV avant signature et le rectifier si nécessaire.

Si vous êtes simple témoin vous êtes entendu(e) seul(e), en l’absence d’avocat, qui ne peut pas vous accompagner dans le cabinet du juge d’instruction. Par conséquent, vous n’avez pas accès au dossier et êtes entendu(e) « à l’aveugle »…

L’acte d’audition par le juge d’instruction personnellement en tant que simple témoin est rare, et est le signe d’un soin tout particulier que le magistrat souhaite apporter à ce dossier en entendant personnellement un témoin manifestement « clé » sur l’orientation du dossier.


2. Le témoin assisté
C’est un peu « l’antichambre » de la mise en examen pour certains, c’est un régime protecteur des droits du mis en cause pour d’autres…Vous bénéficiez du droit d’être assisté d’un avocat, qui a donc accès au dossier pour le consulter, vous en rendre compte, voire même vous en délivrer copie avec l’accord du juge après votre comparution.

Vous avez le droit de demander des confrontations avec les personnes qui vous mettent en cause, et de déposer des requêtes en nullité (nullité de plainte, nullité d’un rapport d’expertise, nullité d’un procès-verbal de constatation d’infraction…).




Le témoin assisté ne peut être mis sous contrôle judiciaire (interdiction de rencontrer certaines personnes par exemple) ou être placé en détention provisoire ou être renvoyé en correctionnel. Pour cela, il doit être mis en examen.


3. La mise en examen
Si vous êtes mis en examen, vous bénéficiez de droits beaucoup plus étendus : assistance d’un avocat, accès au dossier et demande de nullité comme témoin assisté ; mais en plus, vous pouvez demander au juge la réalité de toute mesure utile, comme être entendu de nouveau, être confronté, faire entendre telle ou telle personne, ordonner la production de telle ou telle pièce par une partie, ordonner un transport sur les lieux, une perquisition, une expertise…en d’autres termes, vous pouvez demander tous les actes qui vous paraissent nécessaires à la manifestation de la vérité.

Le témoin assisté peut durant toute l’instruction demander à être mise en examen s’il souhaite pouvoir bénéficier de tous ces droits.

Quel que soit le cadre procédural dans lequel s’inscrit l’audition d’un agent ou d’un élu, celle-ci est un moment crucial pour la suite du dossier, et doit être scrupuleusement préparée en suivant des préconisations simples.


Les Préconisations

1. Être très vigilant
Cela commence dès l’entrée dans les locaux de la police ou de la gendarmerie, dès les premières salutations et les premiers échanges avec l’enquêteur, la mise en confiance du témoin sur des matières très souvent mal maitrisées par les enquêteurs (marchés publics, statuts des agents en matière de harcèlement moral…) est une étape essentielle pour ces derniers. Il convient évidemment de répondre avec correction aux salutations d’usage, mais d’avoir la plus grande retenue dans cette phase préparatoire de l’audition face à des questions très ouvertes, mêmes posées autour d’un café.

Tous les propos échangés en préambule pourront être exploités plus tard dans l’audition pour marquer des contradictions lors de réponses à des questions plus précises.

Vigilance encore pendant l’audition. Vous devrez en particulier vous montrez très attentif au moment de la retranscription des questions et réponses sur le procès-verbal d’audition afin que celles-ci ne soient pas dénaturées par un mot substitué à un autre, ou par un mot manquant.

C’est souvent dans la seconde moitié de l’audition que l’attention devient moins forte et que les premières erreurs de déposition se commettent.

Ne pas hésiter à demander à rectifier le procès-verbal, et si l’élément est important, refuser de le signer, l’enquêteur devant indiquer le motif du refus (ce qui peut être doublé par vos soins d’une lettre au procureur de la République pour justifier du refus de signer).


2. Ne pas répondre à la place des autres
La tentation est grande de vouloir apporter réponse à toutes les questions posées pour ne pas décevoir son interlocuteur. Pourtant, il est essentiel de s’abstenir de répondre à des questions, fréquentes en pratique, portant sur des points échappant à votre compétence ou à vos missions.


3. Vous avez le droit de ne pas savoir !
Il vaut mieux dire qu’on ne se souvient pas de tel point, et qu’on cherchera la réponse, plutôt que de donner une réponse erronée qui pourrait avoir des conséquences importantes pour la suite. On a le droit de dire que l’on vérifiera tel point de retour sur son établissement.


4. Ne jamais aller au-delà de la question posée
La tentation est grande de vouloir compléter ses réponses. L’idée que l’on veut ajouter à sa réponse est très souvent une très mauvaise idée, et il n’est jamais trop tard après l’audition pour faire supprimer cet ajout (par téléphone à l’enquêteur, ou par courrier)